vendredi 24 février 2012

De l'idéologie dominante [Chapitre 3]

(Cet article n'engage que son auteur)

 « La main de celui qui donne est toujours au-dessus de celle qui reçoit » 
Napoléon Bonaparte.


Dans l'épaisse brume de l'été 1789, le rire malicieux de Voltaire dessinait le contour de la nouvelle idéologie à venir. La Liberté reprit ses droits, et une poignée d'hommes éclairés les déclarèrent inaliénables. Pourtant, cachés dans l'ombre de la Révolution française, la troïka* (libéralisme Franc-Maçon, l'usure Juif, le capitalisme Protestant) allait transformer ses droits inaliénables en source d'aliénation pour l'Homme.
C'est beaucoup de savoir que ces trois formations sont à l'origine de l'idéologie dominante et le cœur du nouvel ordre mondial qu'ils ont patiemment construit jusqu'à nos jours, encore faut-il avoir à l'esprit que leurs aspirations n'étaient pas tracées dans le même sillage et qu'un complot n'était pas ourdit dès les premières heures. Seulement, leurs aspirations libérales communes, dans un monde dominé par la verticalité de l'Un (royal) ne pouvaient manquer de provoquer des étincelles que seul un événement de grande ampleur pouvait allumer, ce fut la chaleur de l'été 1789. Un cataclysme qui permit d'ôter les derniers galons de l'Ancien-Monde dominé par les valeurs chrétiennes : les clauses morales (christianisme) et de classe (aristocratie) enlevées, le libéralisme politique et économique avait alors la voie de l'Histoire toute tracée devant lui, il ne lui restait plus qu'à avoir quelques hommes pour l'écrire.

La Liberté est un bien précieux qu'il faut chérir chaque jour, elle est devenue, après des années d'exploitation, le gage universel de la dignité humaine. C'est ce sens de l'Histoire qu'ont admirablement compris les différentes religions (juive, franc-maçonne, protestante) qui ont su saisir le droit suprême de l'Homme – la Liberté – pour y asseoir leur domination [cette fois-ci économique]. Dans une société d'ordre, tout y est figé et l'argent n'a alors que très peu d'importance pour les 98 % de la population que compose le Tiers-Etat (où se trouve la bourgeoisie marchande). A faire voler en éclat ce système et à faire de la Liberté le droit fondamental, n'en fait pas disparaître pour autant une domination quelconque. Et si la nuit du 4 août a aboli les privilèges, il ne s'agissait que de privilèges symboliques.

La nouvelle classe dominante qui s'est installée au pouvoir tout de suite après (bourgeoisie libérale) a tout de suite reformé ces privilèges grâce à l'idéologie libérale en place. Ainsi la prestidigitation aura été de substituer à l'écho populaire, criant « Liberté ! » celui de « Libéralisme », soit la domination - « invisible », puisque fondée sur la « liberté » des consommateurs – davantage économique que politique d'une nouvelle classe issue de la bourgeoisie voltairienne. Une domination invisible où les fers aux chevilles ne se voient pas mais où ils sont en réalité présents. Dominer économiquement sur des hommes libres pour dominer la Politique et les politiques. Pour nourrir son peuple, il faut de l'argent que l'on trouve soit dans les bénéfices de son économie (capitalisme) soit dans l'emprunt (prêt) : qui tient l'argent, tient l’État. Pendant des siècles, les monarchies absolues ont œuvré à unifier le royaume et à battre eux-mêmes monnaie pour que tout vole en éclat après 1789. La Révolution française n'a pas fait seulement que changer de classe dominante (aristocratie => bourgeoisie), elle a aussi de facto enfanté les vices de la Liberté que sont l'Avarice, la Cupidité, l'Usure, et la Luxure. Des fléaux de la bourgeoisie que l'on retrouve jusqu'à nos jours et dans lesquels les trois religions ont puisé leur force d'agir pour instaurer un nouvel ordre mondial qui ferait leurs intérêts sans qu'ils ne soient inquiétés : les fers économiques sont plus faciles à porter pour un homme que les fers politiques, dans le premier, il y verra une négligence de sa part, dans le second, une injustice envers lui.

La domination frontale n'est bonne qu'un temps, l'intériorisation de la domination par les dominés est un gage de perduration du système qui – insidieusement – pousse ces mêmes personnes à se mettre les fers aux pieds. A-t-on jamais vu des révolutions se faire les pieds ferrés, contre des unités abstraites, au nom de la Liberté – qui est déjà l'idéologie dominante ? Le paradigme cyclique est alors à ses balbutiements : s'il profite un temps à une large part de la société, très vite ces richesses seront accumulées par quelques personnes seulement. Mais si les 98 % délaissés que compose le nouveau Tiers-Etat viendraient à se révolter, ils ne le pourraient pas, d'abord parce qu'ils se souviendraient qu'ils ont contribué à mettre en place le système au nom de la Liberté et parce qu'à agir, cela reviendrait à des coups d'épée dans l'eau ou à combattre des fantômes. La verticalité permet de désigner l'homme qui tient le système : le Roi, et à terme de l'abattre pour couper la tête du système ; mais quand celui-ci est horizontale, tout le monde est responsable, autrement dit personne en particulier...C'est ce système qui s'est mis en place pendant le XIXe pour trouver sont acmé en fin de XXe.

Partant du fait que l'idéologie dominante les porterait à satisfaction, les libéraux n'ont eu de cesse d'asseoir leur assise pour créer un paradigme économique qui leur siérait davantage. Encore faut-il distinguer deux formes de libéralisme, le philosophique et l'économique. Le premier tire sa légitimité de la philosophie des Lumières (de Voltaire à Benjamin Constant) et se concrétise dans l'assurance des libertés individuelles. Il est bon an mal an le socle idéologique sur lequel entend prospérer le second, à savoir le libéralisme économique. La liberté d'entreprendre était au préalable nécessaire pour imposer ce nouveau paradigme économique. Les anglo-saxons ont bien compris cette instance en décapitant leur Roi un siècle plutôt que nous pour y instaurer un parlementarisme fort capable de laisser prospérer le libéralisme économique contre l'étatisme et les privilèges de la royauté. En France, la branche orléaniste (qui a voté la mort du Roi) est de cette mouvance. Profitant de la révolution industrielle, des progrès techniques et de l'onction morale des progressistes et autres scientistes à la Auguste Comte ; la bourgeoise libérale a su faire fructifier un idéal en paradigme. Le maillage de l'économie dite réelle a pris un poids si considérable que le politique ne peut plus passer outre, d'autant plus que les guerres européennes sont devenues de plus en plus coûteuses (à la fois en terme de ressources mobilisables et à la fois en terme de déstabilisation d’une économie indexée sur les autres Nations) et les demandes intérieures de plus en plus conséquentes. Cette internationalisation de l'économie et sa prégnance sur la politique ainsi que son expansion dans tous les domaines sont à l'origine de ce que nous nommons le libéralisme économique et qui trouvera son parachèvement dans l'établissement d'une nouvelle société : la société de consommation.

« Il est appréciable que le peuple de cette nation ne comprenne rien au système bancaire et monétaire, car si tel était le cas, je pense que nous serions confrontés à une révolution avant demain matin » Henry Ford, industriel

La franc-maçonnerie a, dans cette troïka, plutôt joué le rôle de régisseur intellectuel et idéologique en prônant le libéralisme philosophique et surtout l'anticléricalisme en plaçant ses pions au Parlement durant la IIIe République. Une haine incommensurable s'est abattue sur l’Église en cette fin de XIXe, parachèvement de celle exprimée un siècle plutôt pendant la Révolution. Quant à la finance, elle a su patiemment s'ériger au dessus du Prince en n'oubliant jamais que « la main de celui qui donne est toujours au dessus de celle qui reçoit ». Pour autant avant d'asseoir son hégémonie, il lui fallait attendre qu'une économie réelle s'internationalise et lance le processus sans fin du système économique mondialiste. La financiarisation suivra cette corollaire en créant à l'image des grandes firmes tout un réseau, voire un cartel de Banques, tenant dans un maillage transnational les principales Nations développées et en pleine essor économique depuis la révolution industrielle. Or cette-dernière ainsi que les idées progressistes à l'oeuvre dans la fin de XIXe ont pour ambition téléologique la modernisation. Or celle-ci se finance par plus d'argent, que l'on trouve nécessairement en empruntant à des groupes financiers et qui sera à l'origine de ce qu'on appellera : l'argent-dette, qui bouscule aujourd'hui toute l'économie mondiale.

Avec ce chapitre 3, se clôt l'introduction à l'idéologie dominante, par la suite chacun des thèmes abordés fera l'objet d'un développement plus poussé, où se conjugueront l'économique, le politique et le social. Le deuxième volet sera consacré à la période allant de 1945 à nos jours.

« Partout où elle [ la bourgeoisie ] a conquis le pouvoir, elle a foulé aux pieds les relations féodales, patriarcales et idylliques. Tous les liens complexes et variés qui unissent l'homme féodal à ses "supérieurs naturels", elle les a brisés sans pitié pour ne laisser subsister d'autre lien, entre l'homme et l'homme, que le froid intérêt, les dures exigences du "paiement au comptant". Elle a noyé les frissons sacrés de l'extase religieuse, de l'enthousiasme chevaleresque, de la sentimentalité petite-bourgeoise dans les eaux glacées du calcul égoïste. Elle a fait de la dignité personnelle une simple valeur d'échange; elle a substitué aux nombreuses libertés, si chèrement conquises, l'unique et impitoyable liberté du commerce. En un mot, à la place de l'exploitation que masquaient les illusions religieuses et politiques, elle a mis une exploitation ouverte, éhontée, directe, brutale. » Karl Marx.

* Les termes de libéralisme franc-maçon, usure juive et capitalisme protestant sont à prendre au sens idéologique. Tous les libéraux ne sont pas franc-maçons, les financiers juifs, et les bourgeois entrepreneurs protestants. Seulement comme ils appartiennent à un corpus idéologique encore minoritaire avant 1789, ils sont majoritaires dans leur propre école de pensée. Ainsi, s'ils ne sont pas exclusifs, ils sont néanmoins majoritaires.


Armonius

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