lundi 13 février 2012

De l'idéologie dominante [Chapitre 1]

(Cet article n'engage que son auteur)

« Dieu se rit des hommes qui se plaignent des conséquences alors qu'ils en chérissent 
les causes » Bossuet.

Dans les convulsions les plus insatiables de la destinée humaine, le cœur et la raison ont souvent fait, dans une certaine constance, leurs ouvrages au sein de la population. De cette instance sont nées deux catégories de personnes, les uns pleurant sur le sort qui les entourait, les autres s'échinant à remonter aux causes pour y tarir jusqu'à la lie les effets consécutifs. A dire vrai, comme le psalmodiait déjà en son temps Bossuet, une troisième catégorie de personne est à l’œuvre au sein de la société : ceux qui pleurent sur les effets dont ils chérissent les causes. 

On pourrait aisément croire que cette ambivalence relève au choix de la psychiatrie, ou du masochisme, et pourtant, c'est la pensée la mieux partagée d'entre-tous ; certains y voient de l'ignorance, d'autres une logique de contradiction interne, mais le commun des penseurs sait y voir les fondements d'une idéologie dominante. On sait assez que l'être humain est pétri de contradictions jusque dans la composition de sa propre pensée, et l'on devrait croire a fortiori, notamment depuis les travaux de Gustave le Bon ( Psychologie des Foules ), que la société n'en est que l'excroissance. Il serait intéressant de remonter jusqu'à la première communauté humaine et ses premières locutions pour comprendre que ce type de personnes a toujours existé, et les civilisations gréco-romaines, chrétiennes, et arabo-musulmanes nous en on fait leur histoire. Il n'en reste pas moins que les idéologies qui ont traversé les âges sont à marquer du sceaux de l'autoritarisme, et même, osons le dire, du totalitarisme.

Le roman de l'Humanité s'écrit avec des idéaux, et se noircit avec les idéologies. Ainsi en est-il de l'épopée humaine, tour à tour emportée par les soubresauts du cœur, des idéaux, pour finir écrasée sous le poids du froid calcul et des idéologies. C'est que l'esprit humain est comme un frêle esquif dans la tourmente, malmené entre deux rivages, faute d'avoir pu ou d'avoir su accrocher une voile à son mât. Peu savent se nantir d'une voile, très peu savent dans quelles directions aller, encore moins savent que la bonne direction n'est pas là où le souffle du vent nous mène, mais là où notre cœur et notre raison nous emmènent. Le vent qui s'engouffre dans les voiles de notre esprit est une denrée assez répandue pour les fainéants et les ignares qui, portés par une ardeur nouvelle, se croient aisément les maîtres de leur embarcation. Il faut parfois être à quai et voir les autres prendre de l'avance, pour s'apercevoir que le flot de bourrasques qui les engouffrent n'est fait que des paroles de ceux qui les manipulent. « Ils ne se servent de la pensée que pour autoriser leurs injustices, et n'emploient les paroles que pour déguiser leurs pensées. » nous disait déjà Voltaire. Il serait malaisé d'en disconvenir puisque nous avons là, les fondements de ce que nous appelons vulgairement : l'idéologie dominante. Façonnée par les dominants et leurs flot de paroles qui pénètrent les voiles de l'esprit commun pour manœuvrer à leur place, l'embarcation, qu'ils pensent tenir. Soit l'intrusion dans ce que Descartes nommait dans son Discours de la Méthode, la raison, qu'il assimilait à un navire dont nous étions les maîtres à bord...
Quoiqu'il en soit, c'est une œuvre assez singulière que l'idéologie ; si elle prend son commandement dans la domination, et ceux qui l'exercent, elle est d'abord l'apanage d'une minorité qui prend le contrôle de la pensée unique ; singulière, encore, parce qu'elle est cyclique : les dominants manipulent les dominés qui n'y trouvent à redire ( Cf. Éloge de la Servitude volontaire, de La Boétie ), ou pire, conscientisés, s'attaquent aux entités qui justement étaient nuisibles à l'exercice de la domination des dominants, soit le fait de pleurer sur des conséquences, et, à défaut de chérir, d'accréditer implicitement les causes... Dominez frontalement et vous ne tiendrez qu'un temps, le temps que la Liberté reprenne ses droits. Dominez insidieusement et vous tiendrez quelque temps, jusqu'à ce que votre machiavélisme ne vous entraîne à sa chute. Enfin, dominez idéologiquement, et vous tiendrez longtemps, car il n'y a rien de plus fort et persistant que la résignation, l'intégration de l'idéologie en soi, et les « idiots-utiles » comme fondement d'une population dominée. Pour rompre ce cycle infernal, il faut savoir redonner de la passion, élever la raison, et guider la population. Tels les philosophes des Lumières, préparant le mûrissement intellectuel pour rompre avec l'idéologie d'Ancien-Régime.


C'est à cette date symbolique qu'est 1789, que débutera notre longue enquête. On ne pourrait en effet comprendre l'idéologie dominante sans remonter au fondement du monde moderne issu de la Révolution française. Ce qui se trame aujourd'hui n'est autre que le fruit de ce qui s'est rêvé avant la Révolution, pensé pendant, entretenu depuis, et réalisé de nos jours. Brassant deux siècles de construction politique, économique et sociale jusqu'au tournant du milieu du XXe siècle, pour arriver à l'année 2012, et ses enjeux majeurs : La crise internationale (économique), les élections présidentielles (politique) et la société contemporaine (social), éclairés à l'aune de l'idéologie dominante que nous aurons patiemment dévoilée.


« Savoir c'est prévoir, et prévoir c'est pouvoir » A. Comte. 

 Armonius


 

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